Au 7e siècle, les représentants les plus autorisés du pouvoir des rois mérovingiens, les fondateurs de la famille carolingienne, vont s’installer sur le site de Chèvremont.

Les premiers noms que l’on retrouve dans des documents historiques sont, au VIIème siècle, ceux d’Ansegise et de Begge sa femme, (décédée en 694), fille de Pépin de Landen Maire du Palais, et de sainte Itte, sœur de sainte Gertrude et de Grimoald. On en retrouve la trace notamment dans cet écrit « Vita sanctae Beggae ducissae Brabantiae », Acta sanctorum Belgii, t. V., pp. 113-115.

Ils vivaient donc au château de Chèvremont. Ce bâtiment était construit en dur, contrairement aux constructions en bois de cette époque. Son importance militaire se révélera à travers plusieurs épisodes. L’archéologie apportera des preuves de l’occupation ancienne du site et attestera également de l’existence d’un vaste ensemble fortifié. Anségise et Begge vont embellir leur séjour et renforcer sa défense. Leur fils Pépin II, dit de Herstal, disposa réellement de Chèvremont. Il a sinon fondé, du moins enrichi par des donations, l’abbaye Notre-Dame de Château Neuf, située à cet endroit. Dans un diplôme du 3 mai 779, signé de Charles roi des Francs et des Lombards, le futur Charlemagne confirme en effet à l’église Sainte-Marie du Novo Castello tout ce que lui avait accordé son bisaïeul Pépin de Herstal, ainsi que, plus tard, d’autres généreux donateurs. D’après les historiens, Pépin II serait enterré à Chèvremont, dans l’église Ste Marie.

Par exemple, sur le socle de la statue équestre de Charlemagne à Liège, on y retrouve tous ses aïeux qui ont vécu ou ont dû passer à Chèvremont : Pépin 1er de Landen, sa fille Begge, Pépin II de Herstal, Charles Martel, Pépin le Bref et Bertrade parents de Charlemagne.

Selon l’histoire relatée dans « Vita sanctae beggae », Ansegise et Begge vont adopter, avant la naissance de leur fils Pépin, un enfant trouvé, Gondowin, qui sera instruit dans le métier des armes. Mais cet enfant cachait une âme envieuse et désireuse de s’approprier l’héritage de ses parents adoptifs. Il va donc tuer Ansegise lors d’une chasse pensant épouser la veuve et ainsi obtenir les droits du domaine. Afin de lui échapper, Begge s’enfuit sans sa famille. La légende nous dit que pour passer la Vesdre dans la vallée, c’est une biche qui lui montrera le gué à prendre. A Andenne, elle va fonder une abbaye avec l’aide de sa sœur sainte Gertrude, abbesse de Nivelles.

Deux épisodes vont montrer l’importance défensive de ce château : Charles Martel (fils de Pépin II), va partager son domaine entre ses 2 fils : Carloman et Pépin le Bref (père de Charlemagne). Leur ½ frère Griffon n’héritera que de quelques duchés. Il va se rebeller contre ses frères et sera enfermé au château de Chèvremont par Carloman pendant 6 mois jusqu’à ce que Pépin III, dit le Bref, se retrouve seul au pouvoir et le libère.

Ensuite lors des invasions normandes, la population va chercher refuge dans cette forteresse qui offrait une protection toute naturelle. Le corps de sainte Gudule, patronne de Bruxelles, y sera transféré par les religieuses de Mortsel pour le mettre à l’abri des envahisseurs. Il en sera de même pour saint Remacle, patron de Spa, dont le corps sera transporté par les moines de Stavelot à Chèvremont.

Toutefois, certains faits politiques seront décisifs pour la suite. En 972 l’Empereur de Germanie, Otton 1er, cède l’abbaye de Chèvremont et les biens qui en dépendent à l’église Notre-Dame d’Aix-la-Chapelle. C’est durant cette même année que Notger, choisi par Otton, arrive dans la cité mosane et est élevé au rang de Prince avec le comté de Huy. La valeur stratégique de la forteresse était reconnue. Elle était convoitée par les Carolingiens de Francie. Ce château était également une menace pour la jeune cité de Liège car il a souvent été occupé par des opposants au pouvoir. En 987, le dernier carolingien meurt sans héritier. Deux familles revendiquent le trône : d’une part les Carolingiens proches de Chèvremont avec Charles de Basse Lotharingie, et d’autre part, les Robertiens, soutenus par l’Empereur de Germanie. Ce sera Hugues Capet qui héritera du trône. C’est donc bien pour des raisons politiques que la forteresse fut assiégée par Notger, soutenu par l’Impératrice Théophano, régente d’Otton III. Cependant, selon l’histoire peu probable racontée par Anselme un siècle plus tard, c’est par ruse qu’il aurait agi en emmenant avec lui des soldats déguisés en moines pour assister au baptême de l’enfant du Châtelain de l’époque. En 987-988, le château, vestige des Carolingiens, sera donc détruit. Fin du Xème siècle, il ne restera plus que des ruines sur le site de Chèvremont.

En 1988, le millénaire de la prise du château sera commémoré de façon grandiose en reprenant le thème de la légende. Un cortège historique composé de manants installés dans des chars tirés par des chevaux de traits, des troubadours, des soldats, Notger et sa garde, vont reprendre le trajet qu’ils auraient emprunté en partant du Palais provincial à Liège, passant par Grivegnée, Chênée, Vaux et la montée vers Chèvremont.

Sources

JOSSE Micheline, L’histoire, dans Chèvremont mille ans d’histoire, Crédit communal, 1988.